Communiqué de La nuit rwandaise
Jean Carbonare n’est plus
"Une gigantesque prison pour un gigantesque cimetière"
Jean Carbonare n’est plus. On apprenait la nouvelle ce dimanche. Samedi soir, celui qui a incarné la conscience de la France face au génocide des Tutsi du Rwanda s’est éteint.
Une gigantesque prison pour un gigantesque cimetière ! (LNR n°2) Mis en ligne par
Mots clés (Tags): Rwanda
Dans le dernier numéro de la Nuit rwandaise, en avril dernier, nous avions l’honneur de publier ses souvenirs de 1994, et une lettre dans laquelle il citait Einstein : « Le danger ne vient pas de ceux qui font le mal, il vient de ceux qui regardent et qui se taisent. » Jean Carbonare n’était pas de ceux qui se taisent. Rappelons qu’il avait pu annoncer le génocide, dès janvier 1993, et dénoncer, à la télé, au journal de 20 heures, la responsabilité française dans la préparation du crime – l’entraînement des milices, la formation à la torture. Surtout, Jean Carbonare avait alors interpelé la conscience de tous, en interpelant le présentateur du journal : « Vous aussi vous pouvez quelque chose, monsieur Masure ! » Tout le monde « pouvait quelque chose », mais en avril 1994 le crime annoncé déferlerait néanmoins. Quinze ans plus tard, Carbonare se souvenait de comment, revenant du Rwanda, il avait eu « la grande naïveté » « de penser que la cellule africaine de l’Élysée allait prendre toutes les mesures nécessaires » pour empêcher le crime annoncé. Il est alors reçu par Bruno Delaye, patron de cette « cellule africaine » : « Dès le début de l’entretien, il met ostensiblement ses pieds sur son bureau, décroche le téléphone et appelle une autre autorité à laquelle il propose “d’intégrer Mobutu dans le processus d’intervention au niveau du terrain”.
Puis il repose son téléphone, et me regarde avec un léger sourire. » Il quitte alors le bureau du prince, « conscient qu’il n’y a plus rien à attendre de la part de nos autorités ». Un grand témoin vient de partir. __ Alors Président de l’association Survie, il témoigne, le 24 janvier 1993, soit presque 15 mois avant le début du génocide, de ce qu’il a vu au Rwanda.Témoignage de Jean Carbonare de retour du Rwanda.
Un texte de Jean Carbonare paru dans la Nuit rwandaise n°2 : • Une gigantesque prison pour un gigantesque cimetière ! (suivi de : Réactions à Pierre Péan)