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Le "mouvement autonome" en ligne de mire

Sabotage des lignes SNCF : « Sans coupables, la police en fabrique »

TIQQUN : Mystiques, messianiques. Saboteurs ?

Les neuf membres d’un groupe soupçonné par la police d’avoir provoqué des dégradations contre des lignes TGV ont toutes été mises en examen pour des faits terroristes et leur chef présumé placé en détention provisoire, a-t-on appris par de sources journalistiques proches de la police [site du Figaro le 15/11/2008].

L’interview du Figaro Mis en ligne par M.
Mots clés (Tags): Autogestion Contrôle social Europe

Le chef présumé du groupe, Julien Coupat, 34 ans, aurait été placé en détention provisoire par un juge des libertés et de la détention (JLD). Il avait été mis en examen peu auparavant pour direction d’une structure à vocation terroriste, un crime passible de 20 ans de réclusion.

Quatre autres personnes devaient être également présentées dans la nuit à un JLD. Deux d’entre elles, Gabrielle H et Yldun L, sont poursuivies pour "destructions en réunion" et "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste", les deux autres pour le seul dernier chef.

Quatre autres personnes auraient été remises en liberté sous contrôle judiciaire après avoir été mises en examen pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste".

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L’interview de Sébastien Schifres, doctorant en science politique et militant du mouvement des « autonomes », classé à l’ultra-gauche par la police, auquel sont soupçonnées d’appartenir les dix personnes gardées à vue en lien avec les sabotages de caténaires à la SNCF.

Il dénonce à Aziz Zemouri (Le Figaro) des arrestations sans « aucun élément matériel ».

Sabotage : « Sans coupables, la police en fabrique »

Connaissez-vous certains des interpellés ?

Pour le moment, la seule personne dont l’identité a été rendu publique c’est Julien Coupat (ancien de l’École des hautes études en sciences sociales et fondateur de la revue Tiqqun, ndlr). C’est un ami à moi qui a souvent été à mes côtés dans le mouvement étudiant. Je suis scandalisé des accusations que la police ose porter contre lui. Aujourd’hui, un intellectuel est en garde à vue pour ses idées. Il n’y a aucun élément matériel pour appuyer la thèse de la police. Et évidemment, quand la police ne trouve pas de coupables, elle les fabrique. En Julien Coupat elle a donc trouvé un faux coupable sous prétexte qu’il a écrit dans une revue révolutionnaire. Michèle Alliot-Marie prétend défendre la démocratie, mais le capitalisme n’a jamais été un régime démocratique.

Vous faites partie du mouvement des « autonomes », qu’est-ce que c’est ?

Il y a aujourd’hui en France des gens qui pensent que Mai 68 ce n’est pas fini et que ce n’est pas en votant pour Olivier Besancenot que l’on fera la révolution. Le mouvement autonome est une tendance du mouvement libertaire qui est apparu en France à la fin des années 70. A la différence des anarcho-syndicalistes qui considèrent que la lutte contre le capitalisme doit s’organiser dans les syndicats, les autonomes préfèrent s’organiser dans des collectifs informels, sans existence légale.

Vous avez vous-même participé à des actions, notamment l’occupation de l’EHESS en 2006. La violence est-elle inhérente au mouvement ?

Les autonomes ne sont pas nécessairement violents. Généralement, la violence vient plutôt de la police comme on l’a vu à Gênes avec la mort de Carlo Giuliani, ce manifestant tué par balle par la police italienne. La plupart des actions des autonomes sont aujourd’hui des actions non-violentes du type manifestation, occupation, ou piquets de grève.

Pourquoi ne pas faire de la politique dans des mouvements légaux ?

Le fait de s’organiser en dehors des structures légales est une question de cohérence révolutionnaire : c’est l’idée que la révolution ne peut se faire à l’intérieur d’un cadre légal. Si un révolutionnaire authentique était élu Président de la république, en admettant qu’il veuille sincèrement mettre fin au système capitaliste, je pense qu’il serait renversé par un coup d’Etat militaire.

Etes-vous hostiles à la démocratie parlementaire ?

Les lois ne sont pas faites pour défendre l’intérêt général. Elles sont faites pour défendre les intérêts de la bourgeoisie. Comme ces lois ne peuvent être changées par un processus légal, on ne peut les changer que par un rapport de forces. Or, ce rapport de forces est nécessairement illégal. Il n’existe pas dans l’histoire d’exemple de révolution qui se soit faite en respectant un processus légal. Pour ces raisons, le mouvement autonome est contre la démocratie représentative car il la considère comme une dictature. De mon point de vue, la seule véritable démocratie c’est celle que pratique le mouvement social : c’est la démocratie directe des assemblées générales.

Historiquement, le mouvement autonome est l’expression de cette démocratie directe née en Italie dans les assemblées ouvrières. Pour ma part, c’est cet engagement pour la démocratie directe qui fonde ma participation au mouvement autonome, dans une perspective autogestionnaire à la fois communiste et libertaire.

Vous avez rédigé une thèse sur le mouvement autonome en France de 1976 à 1984. Le mouvement autonome actuel a-t-il des similitudes avec celui des années 1970 ?

D’une certaine manière, à travers le mouvement des squats et le mouvement étudiant, le mouvement autonome d’aujourd’hui est à mon avis assez similaire à celui des années 70. Cependant, il faut reconnaître que depuis les années 90 les autonomes ont abandonné le recours à la violence militaire. Les hold-up, les attentats à l’explosif, la violence systématique, tout ça c’est terminé ! C’est une question de génération. Entre-temps, la société française a été largement pacifiée. En particulier, on a aboli la peine de mort et le service militaire. Le contexte international a également profondément changé. Les années 70 c’était encore la guerre froide, l’époque de la RDA. La Grèce, l’Espagne, et le Portugal étaient encore des Etats fascistes. L’un des premiers groupes autonomes, le MIL (Mouvement Ibérique de Libération), avait d’ailleurs été fondé par Jean-Marc Rouillan pour lutter contre le régime de Franco en Espagne. Donc le contexte a profondément changé.

Le mouvement a-t-il jamais cessé d’exister ? Pourquoi refait-il parler de lui aujourd’hui ?

Le mouvement autonome n’a jamais disparu même s’il a eu tendance à s’effondrer dans les périodes de repli du mouvement social, lorsque la gauche était au pouvoir. Depuis cinq ans, il y a donc une résurgence du mouvement autonome qui correspond au retour de la droite au gouvernement et à la reprise de l’agitation sociale. Mais si on en reparle aujourd’hui, c’est surtout parce que le ministère de l’Intérieur a décidé d’en faire une campagne médiatique pour se faire valoir.

Tiqqun est une revue philosophique d’inspiration anarchiste qui s’est définie comme l’« organe conscient du parti imaginaire » et « révolutionnaire ». Elle fut fondée par Julien Coupat, avec pour but de « recréer les conditions d’une autre communauté », et fut animée par divers écrivains dont, la dernière année, Mehdi Belhaj Kacem, avant de se dissoudre à Venise en 2001 suite aux attentats du 11 septembre.

Tiqqun par son style poétique et son engagement politique radical s’apparente aux situationnistes et au lettrisme. Il y a une identité transnationale forte à partir d’un arc révolutionnaire Italo-Français.

Tiqqun est bien accueilli dans le mouvement autonome et anarcho-communiste. C’est là son habitat naturel. Son audience peut se développer aujourd’hui notamment dans les squats, dans tous les lieux autogérés, où la dimension poétique, artistique et intellectuelle n’est pas conçue comme secondaire par rapport aux revendications d’ordre plus matériel.

Tiqqun prend parfois une position de Métaphysique Critique qui peut dérouter les militants et autres activistes habitués à une rhétorique strictement matérialiste et athée. C’est à dire qu’il y a dans Tiqqun une dimension spirituelle indiscutable. Le mot même d’ailleurs de tiqqun vient de la tradition kabaliste et messianique juive et signifie tout à la fois réparation, restitution et rédemption.

Le 11 novembre 2008, Julien Coupat, le fondateur de la revue, a été arrêté avec neuf autres personnes par la gendarmerie française à Tarnac (Corrèze), et mis en garde à vue dans le cadre d’une enquête sur des actes de sabotages de lignes TGV de la SNCF, ce qui a suscité l’émotion de certains intellectuels dénonçant une "chasse aux sorcières contre l’ultra-gauche".

A lire :

On a retrouvé les écrits du gardé à vue pour sabotages à la SNCF (Rue89)



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