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France-Rwanda/ Génocide

Aujourd’hui Paris, c’est Berlin. Après le génocide et avant Nuremberg

Analyse de Serge Farnel

A l´occasion de son discours prononcé le 6 mai 2007, le président de la République française, fraîchement sorti des urnes, a déclaré son intention de «  remettre à l´honneur la Nation ». Un programme qui aurait gagné à inclure, comme étape préalable, celle consistant à «  rétablir l´honneur de la Nation », en commençant par celui qu´elle a perdu sur les collines du Rwanda.

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Mots clés (Tags): Armée colonialisme Elections Rwanda

Or à entendre, dans ce même discours, Nicolas Sarkozy vouloir « en finir avec la repentance », on suppute que l´ambition du chef de l´Etat, loin de consister à faire le point sur l´implication de la France dans le génocide des Tutsi du Rwanda, procède au contraire d´une fuite en avant digne de celle qui a sous-tendu, treize années durant, les déplorables relations entre Paris et Kigali.

Pire. Sarkozy ne tenterait-il pas d´entériner, par de tels propos, une nouvelle ère au cours de laquelle la repentance serait désormais implicitement anti-constitutionnelle ?

Non seulement, dans une telle configuration, les crimes de masse ne cesseraient-ils pas, mais seraient-ils au contraire encouragés par cette nouvelle « Nation à l´honneur » privée du privilège de s´auto-flageller tous les demi-siècles, le temps nécessaire pour que la scène politique française fasse table rase de ses personnalités impliquées dans les crimes de masse dont il s´agit qu´elle se repentisse périodiquement.

Et pour justifier l´abandon de la repentance, Sarkozy de la considérer comme une forme de « haine de soi ». Si ce n´est que ce concept, élaboré par Théodore Lessing, s´appliqua initialement aux effets dévastateurs, quant à l´estime de soi, qu´eut, sur certains Juifs, le regard de rejet porté injustement sur eux au cours des années trente.

Le concept de « la haine de soi » n’intègre aucune tentative de compréhension du mécanisme du rejet de l´autre. Et c´est bien parce que la victime n´est pas en mesure de comprendre pourquoi on la rejette ainsi qu´elle finit par intérioriser cette haine de soi parfois même jusqu´au suicide. A moins qu´elle ne parvienne elle-même à disqualifier le regard de rejet que l´on porte sur elle.

Appliqué par Nicolas Sarkozy à la Nation, le concept de «  haine de soi » constitue un contre-pied consistant à tuer dans l´ouf la juste révolte de la population civile française à l´encontre de ceux qui, en son nom, organisent ailleurs les massacres d´autres populations civiles. Il s´agit, en effet, de tenter de la convaincre qu´elle est victime de séquelles psychopathologiques résultant du regard de rejet irrationnel des Nations à son encontre.

Ainsi l’invite-t-il à s´autopsychanalyser plutôt qu´à lui permettre de comprendre, loin d’elle-même, la raison pour laquelle le monde entier pointe aujourd´hui, dans sa direction, un doigt accusateur. Une raison qui tient en ce que certains de ses hauts responsables sont directement impliqués dans le génocide d´un million d´Etres humains. Inutile de se faire psychanalyser !

Un peu plus loin dans son discours, Nicolas Sarkozy entend également « en finir avec la concurrence des mémoires qui nourrit la haine de l´autre ». Est-ce pour éviter que les mémoires ne se concurrencent que le livre coédité par Albin Michel et l´Union des Etudiants Juifs de France, « Rwanda, pour un dialogue des mémoires », a pris le parti de faire dialoguer entre elles mémoire du génocide des Tutsi et mémoire du génocide des Juifs ? Aurait-on craint à ce point que Tutsi et Juifs en soient venus un jour a se haïr ? N’est-il pas plus à craindre qu’à la lecture de la préface de l’ouvrage, dans laquelle Bernard Kouchner nie toute implication de la France dans le génocide des Tutsi, ces derniers finissent par réaliser que ce dialogue entre les deux mémoires n’aura, en définitive, contribué qu’à escamoter la-leur en la privant explicitement de l´élément-clé de sa compréhension ?

On doit aujourd’hui se poser la question de savoir si le nouveau chef de l’Etat français vient, à peine élu, de tenter de faire endosser la responsabilité du génocide des Tutsi au peuple français qui, une fois encore, n’en demandait pas tant.

La question mérite d’être posée à l´intéressé, quand bien même ses étroites relations avec le juge Jean-Louis Bruguière laissait présager de la position de l’ancien candidat sur ce point. Le juge qui se porte aujourd’hui lui-même candidat UMP aux élections législatives du 10 juin prochain dans le Villeneuvois, et qui n’a pas manqué de déclarer que s’il était élu, il ferait preuve, en tant que député, d’autant d’imagination que celle dont il a fait preuve dans la magistrature. Il est vrai que lorsque l’on omet de se déplacer sur les lieux d’une enquête pour laquelle on a pourtant été mandaté, à savoir le lieu où reposent les débris du Falcon 50 abattu le 6 avril 1994, et où l’auteur de ces lignes certifie qu’ils se trouvent toujours, l’imagination reste la seule façon de rédiger une ordonnance, avec toutes les conséquences que cela entraîne, dont le désaveu de son principal témoin, ainsi que le déshonneur qui, une fois n’est pas coutume, rejaillit sur le peuple de France.

Alors le chef de l’Etat français troquera-t-il ses bonnes relations avec le juge contre un peu de Vérité pour cette Nation qu’il entend « remettre à l’honneur » ? Cela ne devrait logiquement pas lui poser trop de problème de conscience s’il pesait un tant soi peu la salve que Bruguière a lancé indirectement à son encontre ces derniers jours : « Qui peut mieux servir un pays que celui dont il est issu », a-t-il en effet déclarer publiquement, avant de se faire plus précis : «  le pays de ses ancêtres » !

Une chose est sûre : on ne réinitialise pas, Monsieur le Président, l’Histoire à chaque échéance électorale. L’Histoire sera toujours l’Histoire comme Paris sera toujours Paris. Et aujourd’hui Paris, c´est Berlin. Après le génocide et avant Nuremberg.

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